Agriculture

La ferme 3.0 est en Essonne

Publiée le : , dernière mise à jour : 24.02.2023

L’agriculture de demain s’invente en Essonne. Sur les hauteurs de Boutigny-sur- Essonne, Clotilde et Nicolas Hottin sont cousins, mais surtout deux agriculteurs connectés. Depuis 2017, les deux trentenaires expérimentent "grandeur nature" les dernières technologies innovantes pour développer leurs cultures céréalières.

Au sud de l'Essonne, dans les champs cultivés par Clotilde et son cousin Nicolas Hottin, poussent du blé et des betteraves, du plant de pommes de terre, du chanvre, du quinoa… mais aussi des capteurs, des sondes et des balises. Les agriculteurs trentenaires testent une quinzaine d’innovations et robots connectés en partenariat avec la Région et la chambre d’agriculture d’Île-de-France. "Nous essayons d’apporter de nouvelles idées pour l’exploitation", lancent Clotilde et Nicolas, cinquième génération à cultiver les terres familiales.

Ferme pilote

La "ferme pilote" vise à évaluer, en grandeur nature, les performances des dernières technologies en agriculture, peu ou pas encore diffusées dans les exploitations. Parmi ces outils numériques, des sondes tensiométriques mesurent en temps réel le niveau d’eau dans le sol. "En fonction de l’évolution des courbes, on déclenche ou non l’irrigation. Cela évite de gaspiller de l’eau", raconte Nicolas Hottin, tablette tactile en main.

Informations ultra-localisées

Autre exemple, une station-météo connectée. Les informations ultra-localisées transmises sur le smartphone des agriculteurs – température, humidité, pluviométrie, vitesse du vent, durée d’ensoleillement – permettent d’organiser les cultures parcelle par parcelle. "Et d’anticiper les risques de maladies, de n’utiliser les traitements phytosanitaires qu’en cas de nécessité", complètent les céréaliers. Des capteurs de biomasse embarqués sur le tracteur permettent d’adapter les apports d’azote en fonction des besoins. D'autres, sur la rampe d’irrigation, contrôlent le système d’arrosage. Des sondes installées dans les silos de stockage du blé déclenchent automatiquement la ventilation pour réguler la température intérieure.

Génération connectée

"Ces outils aident à la décision et facilitent le quotidien. C’est un gain de temps. Ils permettent d’optimiser les quantités d’engrais, de produits phytosanitaires, d’eau ou de carburant nécessaires, en fonction des besoins réels de nos cultures. La facture baisse, tout comme notre impact sur l’environnement", résument les deux agriculteurs essonniens.

Ces équipements préfigurent-ils de la ferme 3.0 ? Peut-être. Mais des freins subsistent. Financiers, d’abord, car ils ont un coût élevé. "Mais les économies financières qu’ils génèrent rentabilisent l’investissement", tempère Nicolas Hottin. Un frein culturel, générationnel, aussi. Mais la nouvelle génération d’agriculteurs, plus connectée que son aînée, devrait aisément contourner l’obstacle.

Une unité de méthanisation exemplaire

Une génération soucieuse de trouver de nouvelles sources d’énergie pour réduire les factures et protéger la planète. Avec deux autres agriculteurs, Clotilde et Nicolas ont installé une unité de méthanisation qui aura nécessité "seulement" quatre ans pour sortir de terre. Un projet accepté par les riverains et soutenu par les élus. Et pour cause. Ce méthaniseur agricole qui transforme les déchets en biogaz contribue désormais à alimenter en gaz quelque 1 500 foyers entre Itteville et Milly-la-Forêt.

Comme l’expliquent les quatre entrepreneurs à l’hebdomadaire régional agricole et rural Horizons, c’est un projet aux multiples atouts : "Environnemental d'abord, puisque le digestat va nous permettre de nous affranchir des engrais chimiques sur nos exploitations et les Cive* limitent le lessivage des sols, structurent les sols et captent le carbone. Économique ensuite, en apportant des revenus stables pour nos entreprises qui connaissent d'importantes fluctuations de chiffre d'affaires ces dernières années en raison des accidents climatiques notamment. Et puis sociétal enfin, ce qui nous rend probablement le plus fiers car la production du gaz couvre 100 % des besoins du sud-est de l'Essonne."

 

* Une culture intermédiaire à vocation énergétique (Cive) est une culture implantée et récoltée entre deux cultures principales dans une rotation des cultures. Elles sont récoltées pour être utilisées en tant qu'intrant dans une unité de méthanisation agricole.