Histoire

Le conte en sa demeure

Publiée le : , dernière mise à jour : 17.11.2016

Le conteur et romancier Alphonse Daudet a séjourné trente ans à Draveil. Sa mémoire et son œuvre foisonnante planent toujours sur son ancienne demeure. Installés dans ces murs, conteurs et acteurs du monde entier perpétuent l’art du récit oral dans une ambiance conviviale.

Douceur de vivre essonnienne

Alphonse Daudet habitera successivement trois maisons dans la même rue de Draveil. Après avoir posé ses valises chez le peintre Eugène Delacroix également amateur de la douceur de vivre draveilloise, puis dans celle de ses beaux-parents originaires de l’endroit, il acquiert sur le tard son propre jardin secret en terre essonnienne. "Moi propriétaire, c’est incroyable !" note non sans autodérision l’artiste désormais enrichi par la vente de ses livres. Une élégante silhouette blanche coiffée d’ardoises se dresse encore au 33 de la rue Alphonse Daudet dans le quartier de Champrosay. De 1886 à 1896, ce pied-à-terre de charme abrite les échappées champêtres de l’auteur des "Lettres de mon moulin" et du "Tartarin de Tarascon" jusqu’à la fin de sa vie. Dans ce qui n’est encore qu’un petit village, l’écrivain y apprécie la campagne entre rives de Seine et forêt de Sénart.

Maison de maître accolée à une ferme au bord de la route de Corbeil parcourue de marchands et voyageurs, ce site lui permet d’observer la vie quotidienne du petit peuple et la nature alentour, ses sujets de prédilection. Dans un petit pavillon construit par ses soins en bord de Seine, il médite à fleur d’eau pendant que la chaleur estivale fait rage. Beaucoup d’œuvres célèbres naîtront dans le parc ombragé ou utiliseront quelques uns des décors et des habitants des environs. Situé dans la propre maison de l’écrivain, le roman "La petite paroisse" reprend l’histoire locale d’un cocu qui aurait bâti la chapelle attenante pour célébrer le retour de sa femme volage… "Jack" nous décrit la fuite à pied d’un jeune adolescent de Paris à Soisy. Même la célèbre chèvre de monsieur Seguin ne serait en fait pas tout à fait provençale…

Montrer la voix

A partir de ses flâneries dans le jardin, à Soisy-sous-Etiolles (aujourd’hui sur Seine), à Corbeil-Essonnes ou en forêt de Sénart et sur la Seine, Alphonse raconte presque quotidiennement des contes pour ses proches et amis dans ce qu’il appelle « L’heure du jeu ». A table, des invités venus de Paris par le train animent souvent les repas. Des intellectuels, peintres et musiciens comme Emile Zola, Edmond de Goncourt, Pierre Loti, Marcel Proust, Auguste Rodin, Vincent Van Gogh ou Jules Massenet comptent parmi les hôtes de marque de la famille Daudet. Le Champrosay de Daudet devient une halte appréciée de ceux qui souhaitent refaire le monde loin du conformisme des salons parisiens. Cet état d’esprit guide encore les propriétaires actuels de l’endroit.

Souhaitant faire revivre le temps de Daudet et rendre accessible ce patrimoine au public, les associations "Maison d'Alphonse Daudet", "Les Bouches Décousues", "Le Temps Qui File" et "Liria" ont élu domicile dans ces murs chargés d’histoires. "On restaure l’âme et les murs en même temps" résume la maîtresse des lieux, Isabelle Guignard, passionnée de Daudet et convaincue du rôle social du conte. La maison reçoit les visiteurs sur rendez-vous pour une plongée dans la vie et l’œuvre et de Daudet par l’intermédiaire de diaporamas et de textes contés en fonction des demandes. Des conteurs et des acteurs en résidence venus d’Afrique, du Québec et d’ailleurs organisent régulièrement des spectacles pour les plus jeunes autant que pour les adultes. "Le conte parle des choses de la vie, de l’humain dans ce qu’il a de plus universel" poursuit celle qui est aussi responsable de l’association "Les Bouches décousues". Ce cadre propice à la rêverie invite à (re)découvrir l’héritage trop méconnu de Daudet et ses dignes successeurs des quatre coins du globe.

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